La crise des métropoles profite aux villes petites et moyennes selon une enquête de Kantar Public pour La Fabrique de la Cité

Kantar Public a réalisé pour La Fabrique de la Cité la deuxième vague du baromètre « Les Français et les villes moyennes ». En novembre 2020, la première édition avait révélé l’aspiration des Français à une vie proche de la nature et l’attrait des villes petites et moyennes. Alors que la crise climatique devient plus que jamais concrète aux yeux des Français, cette deuxième édition s’intéresse plus particulièrement à leurs perceptions et attentes en matière de lutte contre l’artificialisation des sols dans les territoires, mais aussi de réindustrialisation du pays.

Des grandes agglomérations en crise : la revanche des petites villes et villes moyennes

La deuxième vague du baromètre confirme l’aspiration des Français à un idéal de vie au calme, dans un environnement naturel et préservé, loin de la grande ville et de ses désagréments : promiscuité, coût de la vie et insécurité… Comme nous l’observions fin 2020, l’attractivité d’un territoire est inversement proportionnelle à sa densité : l’agglomération parisienne fait figure de repoussoir (seuls 11 % des Français aimeraient y vivre), tandis que 58 % des Français aspirent à vivre dans un village ou un hameau.

En deux ans, l’attrait des petites villes et agglomérations (moins de 20 000 habitants) se renforce encore : elles constituent un lieu de vie aspirationnel pour un Français sur deux (en progression de plus de 10 points), quel que soit leur âge. 30 % de leurs habitants disent d’ailleurs davantage envisager qu’avant le Covid-19 de quitter leur lieu de vie, contre 23 % des habitants des villes moyennes et seulement 13 % des petites villes et zones rurales.

Pour aller plus loin :

Depuis 2020, La Fabrique de la Cité explore les enjeux des villes moyennes : attractivité, réindustrialisation, patrimoine, aménagement. Pour consulter nos travaux et les portraits de ville du Creusot, Cahors, Valence, Aurillac, Vierzon, Charleville et Lens : https://www.lafabriquedelacite.com/projets/villes-moyennes/

En tête des attentes : sécurité, proximité avec la nature et accès aux services de santé

La petite ville répond aux facteurs jugés les plus importants par les Français dans le choix de leur lieu de vie : le sentiment de sécurité (cité comme déterminant par 61 %), suivi de l’accès à la santé et aux soins (57 %) puis de trois dimensions proches évoquées par plus d’un Français sur deux : la proximité avec la nature (55 %), la qualité de l’air (55 %) et la présence d’espaces verts (54 %). Sur chacune de ces dimensions (à l’exception de l’accès aux soins de santé), les habitants des zones rurales ou des petites villes se montrent davantage satisfaits que ceux des villes moyennes, eux-mêmes plus satisfaits que les habitants des grandes villes.

Les petites villes sont perçues comme le territoire le plus adapté pour élever ses enfants… mais aussi pour y passer sa retraite. Selon les Français, c’est également l’échelle qui favorise le plus la qualité des relations sociales, offre des logements de meilleure qualité et où le coût de la vie est plus accessible. Ainsi, avec le village, les petites agglomérations sont pour les Français le territoire qui offre la meilleure qualité de vie. En revanche, l’emploi apparaît comme la faiblesse des petites villes et des zones rurales pour les Français, qui estiment majoritairement que les grandes et moyennes agglomérations sont les territoires qui offrent le plus d’opportunités d’emploi.

Services publics, commerces et mobilité : les arguments des villes moyennes

Les agglomérations moyennes (de 20 à 200 000 habitants) semblent offrir à leurs habitants un équilibre apprécié entre la qualité de vie et le calme propres aux villes à taille humaine et les services qu’elles proposent. Ainsi, six dimensions sont à la fois jugées très importantes pour les habitants des villes moyennes et suscitent une large satisfaction : la présence d’espaces verts, la proximité avec la nature et la qualité de l’air, mais aussi l’accessibilité et la variété des commerces et enfin la possibilité de se déplacer facilement à pied ou en voiture.

La nécessité écologique face aux imaginaires

88 % des Français estiment que préserver les sols naturels et lutter contre l’artificialisation des sols est quelque chose d’important, 59 % l’estiment même prioritaire. Toutefois, derrière ce consensus, les moyens pour y parvenir font l’objet d’appréciations diverses de la part des Français. En cohérence avec leurs aspirations de proximité à la nature, les Français sont avant tout favorables à la renaturation des sols artificialisés (84 %). Ils soutiennent également largement l’idée de renoncer aux nouveaux projets d’infrastructures (60 %) ou encore d’être incités à la rénovation de logements anciens (78 %).

En revanche, ils se montrent plus partagés quand il s’agit de limiter très fortement la construction de maisons isolées et de lotissements (53 % y sont favorables et 31 % opposés) voire de renoncer à la maison individuelle : 46 % des répondants sont opposés à des incitations à vivre en appartement ou en maison mitoyenne (contre 33 % qui y sont favorables). Une opposition qui grimpe à 51 % chez ceux qui habitent en maison individuelle. Les Français se montrent en effet profondément attachés à l’habitat individuel : pour 79 % d’entre eux, la maison est le logement idéal. Cette aspiration existe dans toutes les catégories de population, mais davantage encore chez les ménages employés et ouvriers (81 %) que chez les cadres (73 %).

Parmi les autres actions pour lutter contre l’artificialisation des sols, la très forte limitation de la construction de nouvelles zones commerciales est majoritairement soutenue par les Français (72 %). Une majorité relative de Français (46 %) estime d’ailleurs que dans les années à venir il faut en priorité encourager le développement de commerces de centres-villes. Toutefois, à l’heure actuelle, 57 % d’entre eux disent privilégier les zones commerciales pour leurs achats contre 27 % qui préfèrent les commerces de centres-villes. Si les commerces de centres-villes sont perçus comme plus conviviaux et agréables, les zones commerciales cumulent les avantages suivants : facilement accessibles, bon marché, adaptés à des courses en famille et répondant à tous les besoins.

Pour aller plus loin :

En 2022, La Fabrique de la Cité éclaire les enjeux de l’objectif de « zéro artificialisation nette ». Deux notes de La Fabrique de la Cité détaillent en particulier comment le ZAN peut être mis au service des objectifs climatiques. Pour consulter nos travaux : https://www.lafabriquedelacite.com/projets/zero-artificialisation-nette/

Une réindustrialisation sous conditions : le syndrome Nimby n’est jamais loin

L’idée de réindustrialiser la France est perçue positivement par les Français, et d’abord comme un moyen de créer des emplois et de garantir l’indépendance économique du pays. Ils ne sont toutefois que 4 % à envisager l’installation d’une nouvelle usine près de chez eux sans condition. Les préoccupations sont nombreuses : nuisances diverses (bruits, odeurs, poussières et mauvaise qualité de l’air), sont redoutées par 1 Français sur 2. L’intégration paysagère de l’usine, la création d’emplois qu’elle génère et l’encadrement des risques industriels sont aussi des conditions souhaitées par environ 4 Français sur 10 dans la perspective d’une installation d’usine près de chez eux.

Sur la question de la réindustrialisation, comme sur celle de la lutte contre l’artificialisation des sols, on observe une forte tension non-résolue entre l’aspiration des Français à vivre dans un environnement préservé et la perception d’une réindustrialisation bénéfique pour l’emploi et l’économie.

Méthodologie

Kantar Public a interrogé un échantillon représentatif de Français et d’habitants de villes moyennes. Terrain réalisé du 20 au 29 juin 2022 sur deux échantillons : un échantillon national de 1 000 personnes représentatif de la population française adulte selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession de la personne de référence, région, taille d’agglomération) ; un sur-échantillon complémentaire de 400 personnes habitant dans une ville moyenne ou son agglomération (tranches d’unité urbaines de 20 000 à 200 000 habitants). Interviews réalisées en ligne via le panel.

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