ICCAT, après une décade de déception, le cru 2011 ne déroge pas à la règle. Le WWF est déçu du manque de mesures prises à l’ICCAT pour améliorer à la fois la traçabilité du thon rouge et la gestion de l’espadon de Méditerranée.
On espérait cette année de la Commission Internationale de la Conservation des Thonidés (ICCAT) que l’ensemble des Etats adoptent un plan de protection clair pour l’Espadon de Méditerranée et s’engagent à assurer une traçabilité sans faille du thon rouge. Seules des demi-mesures ont été prises.
L’adoption d’un document de capture électronique ne fera pas tout
Le WWF accueille positivement l’adoption d’un document de capture électronique pour le thon rouge de Méditerranée. Ce document oblige les flottilles, les remorqueurs, les fermes d’engraissement et les autorités nationales à enregistrer toutes les captures au format électronique en remplacement du document papier très imparfait qui était utilisé jusqu’à présent.
Cependant sans amélioration sur la fourniture régulière de données sur les thons transférés dans les nombreuses fermes d’engraissement en Méditerranée – qui représentent la majorité des thons capturés – la mesure perd de son efficacité par rapport à la demande d’amélioration de la traçabilité.
« Le nouveau document de capture électronique de l’ICCAT est un pas important et positif vers la gestion des pêcheries et la protection de l’espèce » affirme Sergi Tudela, responsable de la pêche au WWF Méditerranéen.
« Cependant, le WWF reste déçu du manque continu d’obligation de reporting de données sur la quantité et la taille des thons rouges transférés dans les cages d’engraissement. Cette zone d’ombre empêche toute traçabilité fiable dans ces fermes et facilite ainsi le blanchissement de captures illicites, non déclarées et non réglementées en Méditerranée ».
Le WWF renouvelle sa demande d’une évaluation précise et complète de tous les poissons capturés transférés dans les cages d’engraissement sur l’ensemble de la Méditerranée, ou si cette évaluation n’est pas possible, de bannir cette pratique dans cette mer.
Alerte rouge pour l’espadon
Concernant l’espadon, autre espèce surexploitée en Méditerranée, les mesures prises aujourd’hui restent insuffisantes. La nouvelle taille minimale de capture de 90 cm ne fait que mettre en évidence le nombre de juvéniles capturés jusqu’à aujourd’hui.
Une avancée a tout de même eu lieu concernant la mise en place d’un plan de récupération et de gestion pour le stock d’espadon en Méditerranée pour 2013. Un plan qui comprendrait l’obligation pour les Etats concernés de fournir des données précises sur les captures et la taille des flottilles ainsi que des informations sur l’espèce.
Cette nouvelle collecte de données sur l’espadon devrait permettre au comité scientifique de l’ICCAT d’établir une évaluation du stock et des flottilles ciblant l’espadon ainsi que l’évaluation de la surcapacité pour 2013. Cette évaluation devrait permettre de confirmer la nécessité de la mise en place d’un plan de réduction de flotte similaire à celui actuellement en place pour le thon rouge de Méditerranée.
« Le WWF est déçu du manque d’ambition des mesures adoptées par l’ICCAT pour l’espadon de Méditerranée. Cette espèce est menacée par la surpêche et la capture d’un trop grand nombre de juvéniles » déclare Isabelle Autissier, Présidente du WWF France.
« La bonne gestion des pêches nécessite la fourniture de données appropriées et régulières ainsi que de bons avis scientifiques. Les mesures adoptées par les membres de l’ICCAT cette année à Istanbul devraient aider à améliorer ce point. Le WWF va donc surveiller de très près les états concernés pour s’assurer que tous remplissent leurs obligations de fourniture de données pour l’espadon. »
Discussions agitées autour de la pêche en mer libyenne
De sérieuses allégations concernant la capture illégale de thon rouge dans les eaux libyennes par des flottilles étrangères durant la période de trouble que le pays a connu en 2011, ont largement agité les discussions lors de cette session 2011. Les membres de l’ICCAT se sont engagés à mener l’enquête à ce propos courant 2012, enquête que le WWF suivra de près.
Pour un engagement sur l’amélioration des données scientifiques
Toutes les parties concernées se sont accordées sur la nécessité d’améliorer la qualité des avis scientifiques développés par les scientifiques de l’ICCAT. Un engagement sur cette amélioration a été pris et des experts externes seront invités à participer aux évaluations des stocks, et pour la première fois, une double vision des données de l’ICCAT sera présentée.
« Le WWF félicite l’introduction de ces mesures qui permettront de renforcer les données scientifiques de l’ICCAT qui, au final, seront une base solide pour les plans de récupération et de gestion des pêcheries », déclare Isabelle Autissier, Présidente du WWF France. « Nous espérons que ces améliorations bénéficieront aux prochaines évaluations de stock de thon rouge pour l’année à venir, ce qui renforcera les mesures de gestion de cette espèce en danger. Cet apport régulier d’information par les pays ouvrira le chemin vers une meilleure gestion des pêches à l’avenir ».
Les membres de l’ICCAT présents à Istanbul se sont également mis d’accord sur le principe de « pas de données, pas de poissons » pour lequel les pays ne fournissant pas les données requises pour chaque pêcheries, ne pourront être autorisés à sortir leurs bateaux pour la capture de ces espèces l’année suivante.
Des mesures de protection pour le requin soyeux
Des mesures de protection ont également été introduites pour les requins soyeux, une des espèces de requin les plus vulnérables de l’Atlantique. Le requin soyeux est régulièrement victime de captures accidentelles de nombreuses pêcheries de l’ICCAT et les pays sont à présent obligés de relâcher cette espèce si elle est capturée par des filets ou autres engins de pêche.
La prochaine évaluation de stock pour le thon rouge de Méditerranée et d’Atlantique Est, et donc l’éventuel amendement pour des mesures de récupération et de gestion, aura lieu durant la réunion annuelle de l’ICCAT de 2012.
