Un taux de refus record en lien direct avec le taux d’usure : les courtiers alertent sur un risque de blocage du marché

Pour la première fois, les 6 associations professionnelles d’intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement (IOBSP) – CNCEF, Afib, Anacofi, Apic, CNCGP, La compagnie des CGP – ont réalisé un sondage Opinion System auprès d’intermédiaires en crédit (1471 répondants) afin de chiffrer et mettre en exergue les freins à leur activité que sont notamment les taux d’usure et les normes HCSF. L’objectif de ce sondage est de faire remonter, aux acteurs du marché mais aussi aux ministères du Logement et de l’Économie, des statistiques représentatives sur les refus de crédit afin de déclencher une prise de conscience des difficultés de la profession mais aussi et surtout de ceux et celles qui souhaitent actuellement accéder à la propriété, avec un risque de blocage du marché si rien n’est fait pour lever les contraintes qui pèsent actuellement sur l’octroi de crédit.

Pour 40% des intermédiaires en crédit, plus de 4 dossiers sur 10 sont refusés

Le 1er enseignement de ce sondage concerne le taux de refus observé par les IOBSP depuis le début de l’année. « Nous n’avions jamais été confrontés à autant de refus sur nos dossiers présentés aux banques. Pour 40% de nos intermédiaires, 40% des dossiers sont refusés, et pour 85% le taux de refus dépasse 20%. Des résultats criants sur les problèmes rencontrés par les emprunteurs, dans l’accès au financement pour leur projet immobilier », observe Bruno Rouleau, Président de l’APIC.

Premier motif de refus : le taux d’usure pour 36 % des dossiers suivi des normes HCSF pour 31 % d’entre eux, deux freins majeurs à l’accès au crédit depuis le début de l’année, qui représentent ainsi près de 7 refus sur 10 !

Du côté des banques, les raisons principales invoquées pour expliquer la non prise en charge des dossiers présentés par les IOBSP sont le dépassement du taux d’usure également pour 39 % des dossiers, ou le fait que l’emprunteur ne corresponde pas à leurs critères pour 27 % des dossiers. A noter que seuls 15 % des dossiers refusés par les banques, sont liés au fait que le dossier vienne d’un courtier en crédit.

Les banques demandent de baisser les honoraires pour ne pas dépasser le taux d’usure

Pour tenter de faire passer un dossier malgré le taux d’usure, 18 % des banques demandent systématiquement la baisse des honoraires de courtage, avec comme objectif de faire baisser le TAEG, et 43% le demandent souvent. « Si la hausse des refus n’est pas liée spécifiquement à une défiance des banques vis-à-vis des courtiers mais davantage au niveau des taux d’usure, nous avons un sentiment d’injustice lorsque les banques nous demandent systématiquement de baisser nos honoraires alors même que dans la période actuelle, nous constatons  un volume de travail en hausse sur chacun des dossiers de crédit. Pour autant, l’essentiel étant de parvenir à obtenir un accord pour nos clients, nous sommes prêts dans certains cas à faire ce qu’il faut pour… En espérant toutefois que ces demandes de baisses d’honoraires liées au contexte ne soient que très temporaires et ne remettent pas en cause la pérennité des cabinets », explique Bruno Rouleau.

A cette demande de baisse des honoraires, s’ajoute une baisse du nombre de demandes de prêt depuis le début de l’année. En effet, plus de la moitié des courtiers (56 %) a connu une diminution de la demande comprise entre 0 et 25 % et plus d’un tiers des courtiers (36 %) ont connu une baisse comprise entre 25 et 50 %. « Heureusement, seuls 10 % des courtiers ont constaté une baisse de la demande de plus de 50 %. La période actuelle est donc doublement compliquée car il y a à la fois une baisse de la demande liée à un attentisme des acheteurs, mais également une baisse de l’offre de crédit avec des banques moins incitées à prêter dans ce contexte de baisse de la rentabilité des crédits accordés », complète-t-il.

Le taux d’usure touche tous les emprunteurs

Concernant les dossiers les plus touchés par les refus liés au taux d’usure, on retrouve à 71% les acheteurs d’une résidence principale, suivi des investisseurs avec 24%.

Tous profils confondus, ce sont les emprunteurs âgés de 30 à 55 ans qui sont les plus impactés selon 51 % des courtiers, soit l’essentiel du marché… « Le taux d’usure est devenu le problème majeur pour l’accès au financement, et il concerne tous les emprunteurs, quel que soit leur âge ou leur projet, c’est pourquoi nous souhaitons alerter, avec l’ensemble de la profession, sur le risque d’exclusion d’un nombre croissant d’acquéreurs avec pour conséquence un blocage du marché immobilier », déplore Bruno Rouleau.

« Il ne faut pas se laisser berner par les statistiques de production de nouveaux crédits du 1er quadrimestre de l’année, qui embarquent essentiellement des dossiers acceptés fin 2021 ou tout début 2022. Le coup de frein brutal que nous connaissons va se transposer dans les chiffres à l’automne, avec une inertie forte avant un éventuel redémarrage en 2023 et qui s’étalera sur plusieurs mois. Et ce d’autant que l’appétence des candidats à l’accession a englué les services bancaires dans le traitement des projets, souvent repoussés désormais par l’évolution des conditions de marché », constate encore Bruno Rouleau.

 « Il est urgent de mieux coller à la réalité de la situation des taux, de redonner une marge de manœuvre aux banques, dont on a salué la capacité à maitriser leurs risques auprès des ménages en de nombreuses circonstances, pour leur permettre d’amortir ce coup d’arrêt. Enfin il faut reconsidérer la pertinence des recommandations du Haut Conseil à la Stabilité Financière, dont les effets accentuent le coup d’arrêt. Avec plus de 20 % de montant d’apport moyen sur les projets, les clients ne pourront pas faire davantage, et il n’existe pas d’alternative suffisante quant à l’offre locative disponible, elle-même lourdement impactée par l’inflation » conclut-il.

Sondage réalisé par OPINION SYSTEM entre le 8 juillet 2022 et le 22 juillet 2022 – 1471 répondants

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