Une caméra innovante pour cartographier les habitats marins

Du 3 au 6 août à Toulon, une équipe de l’Ifremer a testé pour la première fois les performances d’une caméra hyperspectrale sous-marine fixée sur le HROV Ariane. Les premières images obtenues confirment que cette technologie émergente parvient à imager les fonds avec une précision millimétrique jusqu’à 500 mètres de profondeur.
Conçu pour être opéré jusqu’à 3000 mètres de profondeur, ce nouvel outil permettra ainsi d’établir une cartographie fine des habitats marins côtiers et profonds dans le cadre des campagnes en mer du projet européen Life MARHA.

Herbiers, laminaires, macro-algues, coraux profonds… Au fil des différentes campagnes du projet européen MARHA, ces habitats marins présents dans l’Atlantique, en Manche et en Méditerranée sont passés au crible d’images aériennes, de vidéos prises in situ et d’analyses d’échantillons. « Le projet Marha a pour ambition de cartographier des habitats marins mais aussi d’estimer la biodiversité qu’ils abritent et même d’évaluer leur état de santé, explique Touria Bajjouk, océanographe à l’Ifremer et coordonnatrice du volet côtier des actions Marha portées par Ifremer. Pour ce faire, nous utilisons d’ordinaire des caméras hyperspectrales, dans le cadre de campagnes de survols aériens à grande échelle ».

Ces séries d’images prises en même temps à des dizaines de longueurs d’ondes dans le spectre du visible et de l’infra-rouge contiennent de nombreuses informations sur l’objet observé. « Mais leur utilisation aéroportée est jusqu’à présent limitée à un usage en zone côtière de petits fonds, précise la scientifique. L’eau absorbe en effet une trop grande partie des rayons lumineux. Selon le niveau de turbidité de l’eau, nous n’obtenons aucun signal interprétable au-delà d’une certaine profondeur ».

Un type d’imagerie innovant pour mieux cartographier les habitats marins

Conçue par la société norvégienne Ecotone, la nouvelle caméra hyperspectrale sous-marine de l’Ifremer est conçue pour opérer jusqu’à 3000 mètres de fond.
« Pour tester son bon fonctionnement en profondeur, nous l’avons installée sur le HROV Ariane. Depuis l’Antéa, elle a effectué 3 plongées entre 200 et 500 mètres de profondeur »annonce Touria Bajjouk.
De premiers tests prometteurs avaient déjà été effectués en 2018 dans la rade de Brest mais à des profondeurs ne dépassant pas 20 mètres.

Une précision au millimètre

Lors de ces cinq jours de tests, l’équipe a obtenu des données de précision millimétrique sur la nature des fonds marins jusqu’à 500 mètres de profondeur.
Elle a ainsi recueilli des centaines d’images prises dans une zone connue de l’équipe et riches en coraux. Cela permettra de comparer leurs résultats avec ceux des missions précédentes effectuées avec d’autres outils et d’affiner ainsi les connaissances sur cette zone.
 
« En imagerie hyperspectrale, chaque objet (coraux, algues, herbiers, roche, vase, …) a sa propre signature répertoriée, explique la chercheuse. Grâce à ces données de haute précision, nous pourrons non seulement discriminer les différentes espèces composant ces habitats, mais également évaluer leur état écologique et leur niveau de dégradation ».

L’équipe va également développer des traitements automatisés des images afin d’en extraire plus rapidement les informations recherchées. Aujourd’hui, en effet, les outils utilisés se basent principalement sur l’interprétation visuelle des images par des scientifiques. « Annoter les espèces et leur état vues sur chaque image est un travail laborieux et très long, indique Touria Bajjouk. De plus, ces interprétations peuvent être biaisées par les niveaux d’expertises variables d’une personne à l’autre ».Des biais qui devraient être limités avec les traitements automatisés à venir.

Suite à ces tests concluants, cette caméra hyperspectrale devrait être utilisée lors des prochaines campagnes techniques et scientifiques, dont celles du projet Life MARHA,  prévues en 2020 et en 2021.

Le projet Life Marha : Jusqu’en 2025, le projet Life Marha est coordonné par l’Agence française pour la biodiversité avec 11 autres partenaires dont l’Ifremer. Son objectif : améliorer l’état de conservation des habitats naturels marins (côtiers et profonds) en optimisant la mise en œuvre de la directive européenne Natura 2000 en mer. Plus de précisions sur l’ensemble du projet Marha sont disponibles sur le site de l’AFB – www.afbiodiversite.fr

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