Lobbies de la viande : une influence omniprésente et insidieuse

Greenpeace France publie aujourd’hui les résultats d’une étude décortiquant les mécanismes d’influence déployés par quatre organisations structurantes des filières viande. Résultat de cette enquête menée pendant un an : de l’influence sur les lois à celle sur les enseignements scolaires, en passant par les professionnels de santé et les réseaux sociaux, les lobbies agissent à couvert ou à découvert dans toutes les sphères de la vie publique et privée pour lutter contre la baisse pourtant indispensable de la consommation de viande et masquer la réalité des impacts catastrophiques de la production de viande industrielle.

–> Lire le rapport et sa synthèse.

L’enquête de Greenpeace se concentre sur quatre organisations centrales du secteur : l’interprofession bovine (Interbev), porcine (Inaporc), de volaille de chair (Anvol) ainsi que la fédération des industriels charcutiers, traiteurs et transformateurs de viandes (FICT). Ces lobbies portent un message commun, qu’ils déploient durant toutes les étapes de la vie des consommateurs, des bancs de l’école aux cabinets du médecin : l’élevage industriel n’existerait pas en France et il ne serait pas nécessaire de réduire notre consommation de viande : une réalité à l’inverse de l’état des lieux dressé par le Groupe d’experts du climat des Nations unies (GIEC). 

Les lobbies de la viande dans le quotidien des Français et Françaises, en quelques chiffres

Le budget annuel de l’interprofession de la viande et du bétail Interbev est compris entre 35 et 45 millions d’euros, dont les ⅔ sont dédiés à des pratiques d’influence (communication, publicité, lobbying, etc.).
En 2022, le budget communication de l’interprofession du porc Inaporc avoisinera les 2 millions d’euros. Parmi ces 2 millions, 500 000 à 600 000 euros seront dédiés à la sponsorisation… de bulletins météorologiques de France Télévision !
Zoom sur le lobby dans la sphère médicale

Pour étendre leur influence, les lobbies de la viande ciblent directement les professionnels médicaux mais également leur patientèle

En 2019, la brochure papier “Apports en micro-nutriments. Quelles conséquences des régimes sans viande” développée par Interbev a été envoyée à 6000 diététiciens et diététiciennes et diffusée lors de congrès de nutrition.
En 2016, la brochure “Santé : n’oubliez pas la viande !” d’Interbev a été distribuée dans 7900 salles d’attente. Au total, ce sont 22 millions de patients et 100% des villes de plus de 100 000 habitants touchés par l’opération.

Zoom sur le lobby auprès des jeunes

Les enfants sont une cible privilégiée des lobbies de la viande. Quoi de plus efficace que d’influencer le futur consommateur de demain dès le berceau?

Entre 2016 et 2019, la campagne “À table avec les Jolipré”, déclinée sur série TV, BD et cahier d’activité a touché 999 communes, 4226 restaurants et 508 985 jeunes de 6 à 11 ans.
En 2020, la campagne “Let’s talk about pork” d’Inaporc a touché 74 millions de millenials en Europe.

Au niveau mondial, l’élevage est responsable de 19% des émissions de gaz à effet de serre issues des activités humaines et les scientifiques sont clairs : pour préserver le climat, la biodiversité et notre santé, l’alimentation dans les pays occidentaux doit évoluer vers davantage de végétal, et les modes de production doivent progresser vers davantage d’autonomie, de pâturage, d’accès au plein air et moins d’intrants de synthèse, explique Laure Ducos, chargée de campagne Alimentation à Greenpeace France. Or les lobbies de la viande, en détournant l’attention des consommateurs de ces réalités et en les incitant à consommer toujours plus de viande, sans distinction des modes de production, vont à rebours de ces recommandations. C’est pourquoi il est indispensable et urgent d’encadrer les pratiques d’influence des lobbies, qui défendent des modèles industriels à fort impact sur l’environnement et freinent l’amélioration et la transparence des chaînes de production et de transformation.”

Greenpeace France lance aujourd’hui une pétition à l’intention du gouvernement et demande  :

  • L’interdiction de toute intervention des organisations professionnelles dans les écoles ; c’est à l’Etat de prendre en charge la création d’outils pédagogiques de haute qualité et de financer des sorties scolaires dans des fermes pour valoriser les métiers agricoles tout en montrant les limites planétaires. 
  • L’arrêt des financements publics des campagnes de communication en faveur de la consommation de viande, qui ne distinguent pas les modes de production. Les subventions dans le secteur de l’élevage doivent favoriser le développement d’élevages écologiques, en particulier français, issus de l’agriculture biologique, intensifs en emplois et à faibles densités animales. 
  • L’obligation de la mention parfaitement visible des initiateurs de toute communication au service d’intérêts privés, en particulier celles adressées aux enfants.
  • L’attribution de fonds suffisants à la recherche publique sur les sujets de la consommation, de la production et de la transformation de viande, afin que des études indépendantes puissent être réalisées sur ce sujet.
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