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Un an après les explosions de Beyrouth : les personnes handicapées sont particulièrement à risque

Il y a un an, les deux explosions du port de Beyrouth ont ravagé la capitale et aggravé la crise économique et financière dans le pays. Aujourd’hui, l’impact de cette crise se fait toujours ressentir et les Libanais dépendent de plus en plus de l’aide humanitaire internationale. La destruction de nombreuses infrastructures, la dévaluation massive de la livre libanaise, et les difficultés d’accès aux soins médicaux et aux produits alimentaires ont plongé plus de la moitié de la population sous le seuil de pauvreté. Dans ce contexte, Handicap International s’inquiète de la situation sociale et économique des personnes handicapées, qui sont particulièrement vulnérables.

Un an après les explosions, des conséquences toujours visibles

Les explosions du port de Beyrouth ont tué 200 personnes et en ont blessé 6 500, dont environ 1 000 enfants. La catastrophe industrielle a fait environ 300 000 déplacés et 70 000 travailleurs ont perdu leur emploi[1]. La catastrophe a aussi endommagé ou détruit environ 73 000 appartements dans une zone de trois kilomètres autour de son épicentre.

Les conséquences matérielles de l’explosion concernent aussi de nombreuses infrastructures : le port de la ville a été entièrement détruit, et les hôpitaux et cliniques de la zone ont été durement affectés. En effet, l’hôpital de Carantina a été détruit, et l’hôpital Saint Georges n’a pas pu fonctionner pendant la réponse à l’urgence à cause de dommages trop importants et des blessures du personnel[2]. S’il est difficile d’obtenir des données fiables sur l’ampleur de la reconstruction aujourd’hui, les équipes sur le terrain constatent que le processus est lent, et il faudra du temps avant que les infrastructures touchées redeviennent parfaitement fonctionnelles. L’ampleur des destructions a créé deux problèmes majeurs pour les Libanais : les difficultés d’accès aux soins et les difficultés à trouver un logement.

« Même si l’explosion s’est produite il y a un an, la population n’en a pas fini avec ses répercussions, je pense notamment à l’impact sur les infrastructures de santé. De nombreux prestataires ne se sont pas encore remis entièrement et souffrent toujours des conséquences, comme une capacité limitée à répondre aux besoins de santé. Au sein de Handicap International, nous constatons une augmentation de 35% du nombre de patients utilisant nos services de réadaptation et de soutien psychologique. Le besoin d’assistance est tel que nous avons même commencé à mettre les gens sur liste d’attente », explique Zeina Salhani, responsable de l’action d’urgence pour Handicap International au Liban au moment de l’explosion.

Une situation particulièrement difficile pour les personnes handicapées

Les personnes handicapées sont particulièrement affectées par la situation, notamment parce qu’elles étaient déjà relativement exclues des circuits économiques, formels et informels. De plus, de nombreuses personnes handicapées ne bénéficient d’aucune forme de protection sociale et dépendent de leurs proches et de leurs familles pour vivre. En raison de la crise, ce soutien familial dont dépendent tant de personnes handicapées n’est plus disponible car leurs proches sont eux aussi en difficulté.

Les personnes handicapées courent donc un plus grand risque d’isolement et d’exclusion, ce risque étant aussi amplifié par l’absence de continuité dans les services d’accompagnement social, y compris les services d’assistance aux personnes dont certains ont un besoin vital.

« Alors que le nombre de personnes qui dépendent des services humanitaires augmente, il est essentiel de s’assurer que les personnes les plus touchées sont prises en compte. Lorsqu’une personne handicapée ne peut pas accéder à la nourriture, ou à un centre de santé pour recevoir un traitement, elle est encore plus vulnérable aux risques », explique Danila Zizi, directrice programme au Liban.

L’impact humanitaire de la crise économique

L’explosion de 2020 a frappé un pays déjà lourdement touché par l’instabilité politique. Elle a contribué à précipiter le pays dans l’une dix pires crises économiques et financières que le monde a connu depuis le milieu du 19ème siècle[3]. En effet, la livre libanaise a atteint un niveau record de 15 000 pour un dollar, alors qu’elle était de 1500 pour un dollar il y a seulement 18 mois. Les Libanais sont confrontés à des pénuries de carburant, à une flambée des prix alimentaires, et la moitié de la population est passée en dessous du seuil de pauvreté.

L’alimentation est devenue un véritable problème pour les familles libanaises. En effet, le gouvernement a réduit ses subventions sur plusieurs produits alimentaires, et le prix d’un panier alimentaire a augmenté de 130% depuis avril 2020[4]. En un an, le prix de la viande et du poulet a augmenté de 165%, le prix des légumes frais de 184%, et le prix des fruits de 137%. Par conséquent, beaucoup de familles ont diminué le nombre de repas consommés par jour et ont modifié leur régime alimentaire pour inclure moins de viande.

Handicap International mobilisée face à la crise

Handicap International se mobilise sur le terrain pour répondre au mieux aux besoins de la population. Les équipes de l’association ont fourni une aide psychosociale à domicile à 2 711 personnes dans les zones touchées par l’explosion, principalement Bouja Hammound, Al Basta et Carantina. Dans le cadre de l’aide psychosociale, les personnels de terrain ont identifié les besoins des bénéficiaires, puis les ont orientés vers les services appropriés ou vers d’autres services. 703 personnes ont bénéficié de sessions collectives de soutien psychosocial et 1 003 bénéficiaires ont été orientés vers des services externes, principalement pour obtenir de l’argent, de la nourriture, des abris et une assistance médicale.

En parallèle, 429 personnes ont bénéficié de services de réadaptation complets, allant de la distribution de kits et d’équipements, à de la réadaptation fonctionnelle (kinésithérapie, ergothérapie ou orthophonie) et/ou de santé mentale. Les équipes de Handicap International ont aussi permis à 261 soignants de suivre une formation en réadaptation fonctionnelle.

Handicap International a aussi continué à lutter contre la COVID-19 : 1 396 ménages ont bénéficié de kits d’hygiène, et les équipes de terrain ont veillé à ce que tous les utilisateurs ciblés soient sensibilisés et reçoivent des messages de sécurité concernant le virus.

A propos de Handicap International

Handicap International est une association de solidarité internationale indépendante, qui intervient depuis près de 40 ans dans les situations de pauvreté et d’exclusion, de conflits et de catastrophes. OEuvrant aux côtés des personnes handicapées et vulnérables, elle agit et témoigne pour répondre à leurs besoins essentiels et améliorer leurs conditions de vie. Elle s’engage à promouvoir le respect de leur dignité et de leurs droits fondamentaux. Depuis sa création en 1982, Handicap International a mis en place des programmes de développement dans plus de 60 pays et intervient dans de nombreuses situations d’urgence. Le réseau de 8 associations nationales (Allemagne, Belgique, Canada, États- Unis, France, Luxembourg, Royaume-Uni et Suisse) œuvre de manière constante à la mobilisation des ressources, à la cogestion des projets et au rayonnement des principes et actions de l’organisation. Handicap International est l’une des six associations fondatrices de la Campagne internationale pour interdire les mines (ICBL), colauréate du prix Nobel de la paix en 1997 et lauréate du Prix Conrad N. Hilton 2011. Handicap International agit et témoigne partout où « vivre debout » ne va pas de soi.

[1] OCHA

[2] https://www.urd.org/wp-content/uploads/2020/10/ETRpostblastBeyrouth_ANG.pdf

[3] https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2021/05/01/lebanon-sinking-into-one-of-the-most-severe-global-crises-episodes

[4] https://dataviz.vam.wfp.org/global-coverage-global-market-monitor-apr-2021