Les 7 péchés capitaux du mail – ou quels sont les comportements peu éthiques liés à son utilisation ?


Vous êtes-vous déjà senti dépassé par le nombre de mails reçus par jour ? Vous est-il arrivé d’être harcelé par un collègue exigeant une réponse immédiate à ses courriels ? Ou encore vous retrouver au cœur d’un échange de mails entre collègues échauffés ? Oui, le mail est devenu le mode de communication le plus utilisé dans les entreprises.

Outil désormais incontournable, il a récemment acquis mobilité et ubiquité avec le développement des Smartphones et Androïds. De telles caractéristiques qui amènent à des comportements parfois peu éthiques et souvent improductifs. Déclinaison de ces nouveaux comportements et des solutions pour y remédier.

Fernando Lagrana, étudiant en DBA à Grenoble Ecole de Management, professeur auxiliaire de management à la Webster University de Genève et responsable des partenariats à l’Union internationale des télécommunications, s’est penché sur les questions d’éthique dans l’utilisation des communications électroniques dans le monde du travail. Son travail de thèse lui a permis de mettre en exergue les comportements les plus fréquents des utilisateurs du mail. Ils sont sept, à l’instar des péchés capitaux…

Péché n°1 : la douce exubérance (ou la multiplication des mails superflus).

C’est le travers typique des utilisateurs qui surchargent inutilement les boîtes mails. A titre d’exemple, l’employé zélé qui transmet ses courriels à plus de destinataires que nécessaire ou utilise la «Réponse à tous» et le « Merci !» sans discernement.

Ce sont aussi des collègues adeptes du « clique et fonce » qui, à peine ont-ils envoyé leur mail, qu’ils font irruption dans le bureau du destinataire ou l’appellent pour avoir une réponse immédiate.

Péché n°2 : l’identité mêlée (ou la fin des frontières entre public et privé)

Elle concerne la séparation vie professionnelle/vie privée qui auparavant était plus marquée. L’avènement du courrier électronique et des mobiles a fait disparaître les frontières entre ses deux mondes.

Le collaborateur reçoit les photos de sa famille sur son mail professionnel comme il peut consulter ses mails professionnels depuis son domicile ou en accompagnant son enfant à une activité extra scolaire.

Péché n°3 : la froide indifférence (ou la déshumanisation du management)

L’indifférence est une nouvelle forme d’abus de pouvoir «électronique», quand un manager montre de manière ostentatoire et publique, par le biais des messageries électroniques, qu’il détient seul le pouvoir de décider et d’imposer. Ces attitudes, qui s’étaient estompées depuis les années 70 et 80, reviennent avec les TIC.

Mais ce sont aussi des attitudes d’exclusion volontaire, comme l’omission abusive, quand un collaborateur est sciemment exclu d’une liste de distribution et ainsi privé d’information, ou le silence, lorsque les mails de certains émetteurs sont délibérément ignorés.

Péché n°4 : la colère enflammée (ou l’insulte en ligne)

Elle concerne souvent les débats en ligne ou des oppositions qui se font par mails interposés. Ces mails souvent secs dénués d’émotion peuvent aller très loin et prendre à parti d’autres collaborateurs ou managers en copie des messages échangés, rendant le débat public. Un tel comportement est rendu possible par le sentiment de sécurité, voire d’impunité, ressenti par les rédacteurs des courriels : auraient-ils de tels mots si leur interlocuteur était présent ?

Péché n°5 : la vérité perdue (ou l’art de manipuler le courriel)

Dans un courrier électronique, comme dans la plupart des documents électroniques, aussi bien l’enveloppe du message que son contenu peut-être manipulés ou altérés, souvent pour nuire. Un tel comportement est totalement contraire à l’éthique et à l’esprit des créateurs du mail.

Péché n°6 : l’ambiguïté coupable (ou comment gagner du temps)

Certains utilisateurs se servent du mail pour rédiger volontairement des messages ambigus ou en prétendant ne pas comprendre le sens d’un message, pourtant clair aux yeux de son rédacteur. On appelle ce premier comportement, l’ambiguïté, le second la confusion, des méthodes souvent utilisées par celles et ceux qui ont tendance à toujours remettre à demain.

Péché n°7 : la porte des secrets (ou l’indiscrète observation)

Avec les mails se pose le problème de la supervision des messages par l’entreprise et le respect de la sphère individuelle, considéré comme un droit moral pour certains. Ici on touche le cœur de l’éthique. Ne pas tenir compte de ce droit individuel est-il justifié par le bien de la communauté que constitue l’entreprise ?

Les solutions : créer un permis de « mailer » ?

Au-delà de ces constatations, quelles solutions apporter pour améliorer l’utilisation du mail et les codes de communication dans l’entreprise ?

Fernando Lagrana explique dans sa thèse que l’utilisation incorrecte des mails est souvent liée à un manque d’expérience des utilisateurs. En effet rappelons qu’à l’origine, le mail a été créé pour la communauté académique qui possédait déjà des règles de communication bien établies. La généralisation de son utilisation s’est faite sans établissement de règles d’usages.

L’une de ses préconisations est d’inclure dans la formation, un volet relatif au choix du mode de communication en fonction du type d’information à communiquer et du public auquel elle s’adresse. Même s’il est très utile, le mail n’est pas le moyen universel pour communiquer et d’autres moyens sont à privilégier dans nombre d’activités.

L’autre grand champ d’actions porte sur la culture d’entreprise et la place de l’éthique au sein même de son organisation. Il est essentiel que les entreprises établissent, mettent en place et diffusent une politique relative à l’usage des TIC. Les employés doivent connaître les comportements admissibles ou proscrits. La mise en place de chartes d’utilisation signée par les employés peut être un exemple.

Pour Fernando Lagrana, «Cet effort doit être commun car nous sommes tous égaux devant l’éthique. Tels les piétons et les conducteurs des réseaux routiers, rédacteurs et destinataires des milliards de courriels qui circulent sur les réseaux d’information partagent un espace commun. C’est pourquoi, sans aller jusqu’à imposer un permis de conduire, chacun devrait faire l’effort d’apprendre le code de la route de ces nouveaux réseaux »

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